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Langues et cité, n° 2 : les pratiques langagières des jeunes

Bulletin de l’observatoire des pratiques linguistiques

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« Langue et représentations de jeunes locuteurs de Saint-Pierre et Miquelon » (1999-2000)
Cette étude confronte les résultats
de deux enquêtes linguistiques menées
à quelque vingt ans d’intervalle dans
l’archipel de Saint-Pierre et Miquelon ;
la première effectuée de 1983 à 1985
auprès de locuteurs âgés de plus de
60 ans, la seconde effectuée en 1999-
2000 auprès d’une population scolaire
âgée de 13 à 18 ans. L’étude comprend
deux volets, l’un proprement
linguistique, le second sociolinguistique.
Au terme de l’enquête, il ressort que
les spécificités phonétiques se maintiennent
bien par rapport à l’état de langue
décrit antérieurement.
Pour ce qui est des régionalismes
lexicaux, la jeune génération les
considère positivement, de manière
générale, mais plus comme « objet »
d’un patrimoine que pour leur utilité
expressive. En fait, le vocabulaire propre
aux îles est peu connu de la nouvelle

génération. Enfin, l’analyse des discours
des représentants de la jeune génération
montre que la présence de traits
phonétiques considérés comme
spécifiques de la région peut varier
en fonction de choix de vie, de
positionnements identitaires et de
représentations linguistiques différents.
Le prestige du français de France est
reconnu de tous. Pourtant, les marques
spécifiques de la variété des îles ne sont
pas forcément abandonnées par tous
car la « norme » locale endogène, centrée
sur la prononciation, n’entre pas
forcément en conflit avec la norme
scolaire, cette dernière étant plus centrée
sur les aspects lexicaux et, surtout,

morphologiques et syntaxiques.
La revendication de cette spécificité
« locale », « identitaire », contribue sans
doute, au moins en partie, à réduire
l’insécurité linguistique de ceux-là même
qui la pratiquent.

Patrice BRASSEUR et Laurence ARRIGHI
Université d’Avignon et des Pays de Vaucluse
 
Les pratiques langagières des jeunes