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040 Langues et cité, n° 2 : les pratiques langagières des jeunes Bulletin de l’observatoire des pratiques linguistiques |
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Pratiques langagières, représentations et (re)construction d’identité chez les jeunes locuteurs d’une ville nouvelle : l’exemple de Carros-le-Neuf, Alpes-Maritimes |
Il s’agit d’appréhender les processus actifs dans la construction des pratiques langagières. De façon délibérée, c’est en rapport avec l’étude de la structure géographique et sociale de l’espace communautaire réel et représenté que l’étude des pratiques des jeunes Carossois a été abordée. L’option théorique retenue a permis, dans ce cadre, d’approcher le fonctionnement des comportements langagiers et les représentations subjectives des pratiques langagières. Dans ce contexte, on retient l’existence de normes liées, qui ne peuvent être perçues sans une enquête1 participative2. Ici , la mise au jour de la biographie langagière aura permis de percevoir la structuration de la personnalité sociolinguistique au travers de la famille, du groupe de pairs et de l’école. Lieu premier d’acquisition du langage, la famille est le lieu d’interactions verbales complexes : les échanges s’y réalisent selon différents cas de figure. La langue d’origine est peu utilisée (17%) par rapport au « mélange » (41%) et au français3 (42%), ces 17% qui utilisent leur langue d’origine sont principalement constitués de filles, qui jouent ainsi un rôle fondamental dans la transmission culturelle. Quant à l’école, elle apparaît comme le premier lieu d’acquisition du français : 60% des interactions s’y effectuent dans cette langue contre 27% dans la langue d’origine et 13% en « mélange » ; mais les 27% d’usage de la langue d’origine ne sont pas « innocents » : ils possèdent soit un rôle cryptique, soit une fonction identitaire reposant sur un conflit avec l’établissement scolaire. Les entretiens ont montré que les groupes de pairs possèdent une identité linguistique liée à l’identité ethnique. La norme du groupe repose fortement |
sur l’adhésion à un certain registre de vocabulaire et de tournures syntaxiques ; conséquemment, l’usage du français présente des particularités, telles la présence récurrente de « que », certains ponctuateurs, l’usage transgressif du français et la vulgarité comme usage identitaire. Finalement, les processus langagiers identifiés expriment la position des jeunes face à des valeurs identitaires propres au groupe et traduisent l’adoption d’une norme. |
1) Corpus de dix Cd-rom au format AIFF. sur l’adhésion à un certain registre de vocabulaire et de tournures syntaxiques ; conséquemment, l’usage du français présente des particularités, telles la présence récurrente de « que », certains ponctuateurs, l’usage transgressif du français et la vulgarité comme usage identitaire. Finalement, les processus langagiers identifiés expriment la position des jeunes face à des valeurs identitaires propres au groupe et traduisent l’adoption d’une norme. 2) On sait que c’est en participant au quotidien communautaire que l’on peut tenter de dépasser le rapport déséquilibré de l’enquêteur à son objet d’enquête. 3) Au sein de la fratrie surtout. |
Juillette BOURLIER-BERKOWICZ, U.M.R. 6009 «Bases, corpus et langage». |
Les pratiques langagières des jeunes |